«Combien d’années cette brigade ″bénévole″ de concepteurs sera-t-elle capable de suivre ce projet gigantesque au cours des dix prochaines années ?»
18 novembre 2017
Guy A. Lepage à son émission «Tout le monde en parle » a donné la parole au chef Ricardo. Un gros plat pour défendre une idée au sujet du fonctionnement de nos écoles concernant la bouffe. Une généreuse initiative de 3 millions du gouvernement répartie sur cinq ans au groupe «Lab-École».
Pour comprendre, il faut lire ceci :
«Le projet Lab-École sera testé dans cinq ou six écoles d’ici 2021.» Dans Le Devoir , 8 novembre 2017.
Une belle brigade de personnalités respectables désire relever le défi. Elle se compose du ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, l’architecte Pierre Thibault, le chef Ricardo Larrivée et l’athlète Pierre Lavoie.
Ils ont dévoilé les grandes lignes de l’«école du futur». Pour ce faire, ils ont fondé un organisme sans but lucratif «Lab-école» pour les «Écoles de demain» - rien de moins. Pour sa part, le gouvernement a prévu mettre à son budget un montant de «3 millions sur deux ans [qui] ont été libérés spécifiquement pour Lab-École». Malheureusement, explique l’architecte Pierre Thibault, «on ne pourra pas faire toutes les écoles, mais on veut qu’il y ait des phares pour éclairer les façons de faire.»
L’ambition du ministre de l’Éducation est décrite en ces termes :
«Le Lab-École examinera les meilleures pratiques et les plus beaux exemples pour concevoir et élaborer de nouveaux concepts et plans d'écoles offrant un environnement optimal d'apprentissage et d'enseignement, centré sur les besoins des élèves et des enseignants.»
Quatre «infra-fonctionnaires» seront chargés d’agir «bénévolement» au nom de l’État pour notre plus grand bien. En avril 2017, le ministre prévoyait une aide de 1,5 millions ,puis cinq mois plus tard il doublait la mise à 3 millions.
Ces personnalités veulent aider l’école québécoise. Dimanche, le 14 novembre 2017, le chef Ricardo est venu à TLMP mousser le projet de «Lab-École» du ministre de l’Éducation. C'est du marketing avec la complicité de Guy A. Lepage et de Radio-Canada. D’autre part, l'État du Québec a agi avec désinvolture et insouciance.
Déjà, en avril 2017, le professeur associé Gérald Boutin de l’UQAM avait rappelé au public qu'un système scolaire doit se préoccuper d'éducation, c'est-à-dire d’une vision de la mission de l'école comme lieu d'apprentissage visant le développement des enfants et adolescent.es des écoles et de la vie de cette société.
L'aventure du projet «Lab-École» (3 millions $$$), risque d’être de la poudre aux yeux quand on sait ce que c'est un système d'éducation. Voir Gérald Boutin - Professeur associé, UQAM , Le Devoir, 4 avril 2017.) Un système d'éducation ne peut fonctionner par à-coups. Voir le graphique ci-dessous qui montre la complexité du système d’éducation.
Figure 3 Amélioration en vue de l'action commune« (Communication de Bruno Deshaies au Colloque international de l’AFIDES, Montréal, 1996.)
Pour le moment, ce n’est qu’un feu de pailles. Car il ne faut pas confondre la construction d’écoles avec la mission éducative comme telle de l’école. Celle-ci dépasse les notions de compétences grossièrement confondues avec la conception des programmes d’étude mise de l’avant par la réforme des dix dernières années. Par ailleurs, il ne faut pas plus rêver que des bâtiments écoles re-conceptualisés pourront, en soi, satisfaire les besoins de vie en «société» dans les écoles. C’est une évidence. Les murs d’une école seront toujours une contrainte. Le Ministère de l’Éducation n’a pas encore compris l’ampleur de ses obligations politico-sociales de 3 millions pour le projet «Lab-École». C'est nettement insuffisant compte tenu du nombre d'écoles plus ou moins délabrées sur le territoire au Québec.
Des analyses plus poussées devraient être réalisées au lieu de projeter arbitrairement «des phares pour éclairer les façons de faire» la construction des écoles. La privatisation de la conceptualisation de l’école de demain par une «Organisation sans but lucratif (OSBL) nous est arrivée comme un cheveu sur la soupe. Soyons pratique. Combien d’années cette brigade ″bénévole″ de concepteurs sera-t-elle capable de suivre ce projet gigantesque au cours des dix prochaines années ? Ce n’est pas le signe d’une planification sérieuse de la part du gouvernement.
L'État ne peut se délester de ses responsabilités comme il l'a fait pour la réforme des programmes et de l'enseignement. Et que dire pour les ingénieur.es au Ministère des Transports. Cette vision de plomber l'État doit être abandonnée.
Bruno Deshaies