SE GOUVERNER OU ÊTRE GOUVERNÉ ?
L'immigration n'est qu'un volet de tous les pouvoirs d’Ottawa.
La constitution canadienne donne tous les pouvoirs au fédéral sur la citoyenneté. Cette chronique offre une réflexion sur le phénomène pour une nation qui est gouvernée par une autre nation. Elle concerne le sujet suivant : «Le PQ en pleine dérive».
Le problème pour le PQ est encore plus grave, car «le PQ est en pleine dérive» sur son principal objectif qui est l'indépendance politique du Québec. Ce que ce parti n'a pas encore admis concerne le conflit politique entre le Québec et le Canada. Un contentieux qui a ses origines dans les premières années de la Confédération. Il a opposé le premier premier ministre du Québec, P. J. O. Chauveau contre John A. Macdonald, premier premier ministre du Canada, sur la question de l’immigration. Au fait, le problème est inhérent à la constitution elle-même et non pas dans les relations intergouvernementales canadiennes (soit le partage des pouvoirs) .
Le PQ doit s'interroger sur cette question fondamentale qui concerne la lutte nationale. L’objectif de ce combat doit être mieux défini. Et, en plus, il doit être dit. C’est tout un défi. Il faut faire comprendre cette lutte pour la suprématie afin d’être indépendant.
Le public québécois attend un message non équivoque. Pour cela, il faut des mots pour leur dire «Se gouverner soi-même» pour mettre fin à la lutte épuisante d’une nation contre une autre au sein d’un même État.
L’historien Maurice Séguin a abordé la question dans son Histoire de deux nationalismes au Canada. Je cite :
En poursuivant la description de la lutte «nation contre nation» qui oppose à l'intérieur du Lower Canada les Canadiens-Français aux Canadiens-Anglais, il importe de discerner très clairement les trois degrés du conflit national ou d'affrontement.[1]
1e degré : animosité entre étrangers
Le premier degré se réfère aux sentiments irraisonnés, indéfinissables, assez primitifs qui opposent des hommes d'origine différente. C'est l'animosité, la xénophobie, la lutte contre l'étranger parce qu'il est étranger.
2e degré : divergence d’idées
Le deuxième degré se rapporte aux divergences de mentalités, de philosophie, aux différences de lois, de coutumes et d'institutions. La lutte nationale, à ce deuxième degré, couvre des points très précis et peut facilement être décrite.
3e degré : lutte pour la suprématie
Le troisième degré concerne la lutte
─ pour la prépondérance;
─ pour être la majorité dans un État séparé;
─ pour être indépendant;
─ pour réussir son propre séparatisme;
─ pour être maître chez soi.
C'est évidemment l'aspect le plus important dans un conflit qui dresse, à l'intérieur d'un même État, une nation contre une autre nation. Généralement, ce conflit national au troisième degré se ramène à ceci : conserver la majorité ou devenir la majorité dans un État séparé. On se bat pour conserver la majorité ou devenir la majorité dans un État séparé.
La lutte nationale au troisième degré est plus abstraite que la lutte nationale au deuxième degré. Mais encore une fois, elle est infiniment plus importante.
Deux nationalités en conflit se heurtent, se querellent sur un grand nombre de points secondaires : lois, coutumes, mœurs, institutions. Ces divergences du second degré accaparent les esprits à 99 p. 100. Presque toutes les récriminations entre les deux nationalités se font probablement à ce niveau. Ce n'est donc que très rarement que l'on rencontre, affirmée exclusivement et clairement, et surtout sciemment, la lutte nationale au troisième degré pour la prépondérance, pour la suprématie, pour l'indépendance dans le séparatisme.
C’est cette lutte au troisième degré que le Parti Québécois est incapable d’envisager. Nos ancêtres n’ont pas réussi ; nos politiques souverainistes ne maitrisent pas plus la nature du conflit national. Ils s’agitent dans l’arène politique de la lutte du domaine-des-rivalités-partisanes. Or, l’indépendance exige une vision de politique nationale ― «pour être maître chez soi». Il faut répondre à la question :
Qui gouverne?
Autrement dit : Se gouverner ou être gouverné ? C’est le dilemme. Un choix s’impose. L’indépendantiste n’a plus le choix, il doit penser dans l’optique indépendantiste et rien d’autre. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne respectera pas les autres nations, mais dans l’égalité de statut. Donc, vivre avec les autres, mais par soi. C’est la condition principale de la liberté collective qui ne se confond avec les libertés individuelles.
Pour le moment, l’éducation à l’indépendance est sur le carreau. Chacun dans sa chapelle !
Pour l’action, il faudrait bien se poser la question qui suit :
«Comment en finir avec nos incompréhensions nationales ?» http://blogscienceshumaines.blogspot.ca/2017/08/blog-post.html
Cette préparation est incontournable. De plus, il ne serait pas moins important de s’interroger sur le cas de «nation(s) dans un État souverain».
Nation(s) dans un État souverain
Principaux types ou degrés d’annexion politique, classés par ordre croissant de liberté collective conservée par la minorité
Nations(s)_dans_Etat_souverain3-7-4_5
Et encore, en corollaire, je proposerais deux lectures :
Sur l’actualité récente
Marc Lapierre du 13 août 15h12 en commentaire d’une Chronique sur le site www.vigile.quebec
http://vigile.quebec/La-naivete-des-souverainistes
REM. : Il faut à tout prix lire ce commentaire, car c’est une belle leçon d’analyse politique.
En complément de cette analyse :
Commentaire de Brun Deshaies, 14 août 2017 11h17
«Nous devons connaître notre Passé récent et lointain.» http://vigile.quebec/La-naivete-des-souverainistes
INDÉPENDANCE NATIONALE DU QUÉBEC 403
Se gouverner http://vigile.quebec/Se-gouverner
Chronique de Bruno Deshaies, mardi 9 avril 2013.
«Pour une collectivité nationale annexée, c’est vouloir bien conduire sa barque, mener la barque et garder le gouvernail, mais surtout mettre en œuvre l’idée d’indépendance nationale.»
Pour conclure, il faudrait noter quatre grands enjeux pour les partisans de l’optique indépendantiste concernant le rapport entre «Fédéralisme et nationalités». Veuillez consulter :
LES PARTISANS DE L'OPTIQUE INDÉPENDANTISTE
Ils perçoivent les limites et les inconvénients du fédéralisme.
Ces enjeux existent autant pour la nation majoritaire que pour la nation minoritaire.
Normalement, un indépendantiste devrait percevoir les limites et les inconvénients du fédéralisme dans lequel il est soit le fédéré ou le fédérant. Autrement dit, pour le fédéré, il doit savoir qu’il ne détient que les pouvoirs, les droits et les moyens ou permissions d’une nation annexée. Il doit aussi comprendre que, forcément, la nation à laquelle il appartient est intégrée à une nation indépendante et que, de facto, il subit les conséquences d’une subordination et d’une infériorisation sur place par superposition d’une autre nation « plus riche ».
Les effets de ce conditionnement politique se font sentir tant sur les individus que sur la nation à laquelle il appartient. Même que ce n’est pas une question d’être «bien» gouverné, bien «exploité», et que ce n’est pas d’être « mal » gouverné, mal exploité pour éprouver des désavantages et avoir le droit de songer à se libérer. Finalement, c’est avant tout une question de force plutôt qu’une question de justice. Une nation a le «droit» que lui confère sa «force»...
Le public sait que le combat sera difficile. Il ne demande pas mieux que d’être éclairé. «Les souverainistes sont rarement à court d’idées. Mais tout serait plus simple si un minimum de cohésion et de compréhension existait entre eux.» (Cf. supra «Se gouverner». 9 avril 2013). Se gouverner soi-même devrait être un objectif stimulant. Malheureusement, il manque un noyau initial pour enclencher l’action dans la bonne direction auprès du public et de la masse de tous les citoyens et citoyennes.
O O O
Pour terminer cette présentation du conflit politique au Canada et se divertir un peu, je citerai la première partie de la Divine Comédie de Dante au Chapitre huitième :
« Va, ne crains rien, […]
Mais, attends-moi ici, et tes esprits lassés,
conforte et nourris-les d’une bonne espérance :
Je ne te laisserai au monde inférieur.»
Ainsi s’en va et ici m’abandonne
Mon bien cher père; et moi je reste en doute,
Car oui et non disputent dans ma tête.
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[1] Dans Histoire de deux nationalismes au Canada : LEÇON V : «Trente ans après la Conquête : Qui gouverne? (1796-1807)». Cf. p. 126-127. Voir l'ANNEXE II au chapitre 1 (p. 26-30) ainsi que l'ANNEXE 4 sur la théorie de Maurice Séguin concernant «La notion d'oppression» (p. 141).