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Évitons le gaspillage

On a trop investi en éducation au Québec pour se contenter d'une réforme superficielle comme celle qui s'annonce encore une fois.

Pourquoi ne ferions-nous pas l'économie de ce gaspillage de ressources financières et d'énergie humaine à des fins plus utiles ? Travaillons honnêtement et sérieusement avec les enseignantes et les enseignants dans toutes les branches des programmes et mettons fin à nos désirs fumeux de tout vouloir réformer - hormis soi-même. Trop de châteaux en Espagne ont été construits dans nos têtes. La ministre de l'Éducation, Pauline Marois, devrait revenir sur terre et réaliser l'étendue de l'œuvre à faire, sur le terrain, puis avec les gens de terrain (sans pour autant nier l'importance de nombreuses collaborations universitaires, de rédacteurs de manuels et d'éditeurs, de producteurs de matériel multimédia, de directrices et de directeurs d'école, etc.). On a trop investi en éducation au Québec pour se contenter d'une réforme superficielle comme celle qui s'annonce encore une fois. Les experts, tout autant que le public, sont justifiés à bon droit de s'inquiéter maintenant du sort des entreprises de curriculum comme on nous l'annonce une énième fois.


NDLA.- L'état actuel de la situation des programmes en sciences humaines au Québec est difficilement évaluable. Grosso modo, il semble qu'environ les trois quarts des maîtres du primaire consacrent moins de 2 h/sem. à l'enseignement du programme des sciences humaines alors que le Régime pédagogique prescrit 2h/sem. La tendance générale tourne vers une détérioration de la situation depuis 1994. Au secondaire, pour le secteur des jeunes, le temps prévu à l'enseignement de l'histoire qui était de 125h/année en Secondaire II et IV (histoire générale et histoire du Québec et du Canada) est maintenant à environ 75 à 80h/année. En revanche, pour toutes les clientèles d'élèves de l'enseignement professionnel et de l'enseignement au secteur des adultes, la situation est nettement plus problématique. À toute fin pratique, l'enseignement des sciences humaines est inexistant. Or s'agit-il de 10 % ou de 50 % de la clientèle du secondaire, c'est un calcul qui reste à faire. La proportion pourrait être plus élevée que ce que nous pouvons soupçonner. Donc, c'est peut-être un élève sur deux qui quittera le secondaire sans avoir suivi un cours d'histoire nationale. Malgré ce constat, on nous annonce sans rire le moindrement du monde une réforme qui prendra effet quelque part vers 2002 pour le primaire et 2006 pour le secondaire !* D'ici là, que se fera-t-il vraiment ? Il faudra sûrement plus que des discours politiciens ! Il faudra de l'action sur la situation réelle dans les écoles.

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(*) Cf. Réaffirmer l'école. Rapport du Groupe de travail sur la réforme du curriculum, Gouvernement du Québec, 1997, p. 109. Le nouveau diplôme d'études secondaires (DES) renouvelé (!) sera émis la première fois en juin 2006.

Bruno Deshaies, Brevet « A », B. Péd., D. ès L. (histoire, Université de Montréal)
Ex-directeur de la division de l'enseignement des sciences de l'homme
au ministère de l'Éducation d'octobre 1969 à juillet 1977.

Québec, 2 septembre 1997 / 4 mars 1998

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