Chaire de civilisation canadienne-française (1953-1956)
Rond-Point Histoire Histoire du Québec (1760 à nos jours) / Évolution historique du « deuxième » Canada Chaire de civilisation canadienne-française (1953-1956)
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Évolution économique, sociale et politique du canada-français (1760 à nos jours)
1er cours - Changement d'empire [2]
Un groupe ethnique est parvenu à une vie équilibrée et réussie quand, à la base, il a su maîtriser sa vie économique et gérer par lui-même sa politique intérieure et extérieure. Ce sont là les caractères fondamentaux d'une nation.
Une nation peut se former par lente évolution, telles l'Angleterre, la France, l'Espagne, ou par colonisation, comme l'Argentine, l'Australie, les États-Unis.
Dans le processus de la formation d'une nation par la colonisation, la Métropole joue un rôle dont on ne saurait exagérer l'importance. C'est elle qui, à l'origine, implante dans la colonie les éléments capables d'assurer à la future nation une vie économique et politique autonome. C'est la Métropole qui pendant longtemps alimente et enrichit les forces coloniales déjà acclimatées. C'est enfin la Métropole qui, directement ou indirectement, après avoir fourni nombre et richesse, équipe les coloniaux de l'audace et des moyens voulus pour affirmer et maintenir leur indépendance politique et économique.
II
Dans l'Empire français d'Amérique, sous la tutelle enrichissante d'une métropole : la France, en 1760, une jeune nation s'initiait intégralement à la vie. L'œuvre comprenait de tout : vie économique diversifiée, vie politique, etc. Et les coloniaux, de concert ou de conflit avec les métropolitains, participaient à des degrés divers aux activités de leur patrie, d'un pays qu'ils étaient en train de bâtir grâce à l'Empire français et dont ils seraient les seuls héritiers.
Mais l'œuvre recelait un grave défaut : cette disproportion numérique marquée entre la colonisation anglaise et la colonisation française. La qualité y était, la quantité manquait.
Vers 1750, il restait encore beaucoup à recevoir de la France, dans chacun des divers domaines essentiels à la vie d'une nation en formation, afin que le Canada puisse tenir devant la colonisation anglaise rivale. Que d'immigrants, d'hommes d'affaires, de capitaux, de techniques, il faut ajouter si cette colonie veut persister sans déchoir dans ce monde moderne sur le point d'entrer dans la révolution industrielle ! Pour que cette colonie d'Amérique de 1750 puisse vivre par elle-même, en nation réussie, les époques de 1850 ou 1950, elle a un besoin de garder et même d'intensifier ses contacts avec ses sources de colonisation française.